Culture

Art : De la scène à l’entrepreneuriat, comment un festival transforme la vie des femmes

Depuis 2019, la ville de Goma découvre chaque année un événement culturel qui change la donne pour les femmes de la région. Le festival Musika na Kipaji, dont le nom signifie « talent et scène » en swahili est devenu bien plus qu’un simple spectacle artistique.

Dans une ville marquée par les conflits et l’instabilité, ce festival offre aux femmes une plateforme unique pour s’exprimer, apprendre et créer. L’initiative portée par une organisation locale rassemble des artistes, des formatrices et des participantes autour d’un objectif commun, redonner aux femmes leur place dans la société par l’art.

L’évolution du festival témoigne de son succès grandissant. La première édition avait réuni une trentaine de jeunes filles et quelques artistes. Aujourd’hui, l’événement attire plus de 800 spectateurs et forme plusieurs centaines de femmes chaque année.

Les activités se sont diversifiées au fil des éditions. Aux côtés des prestations musicales et de danse, le festival propose désormais des formations pratiques, pâtisserie, photographie, techniques de sonorisation, ou encore art oratoire. Ces ateliers répondent à un besoin concret d’autonomisation économique pour des femmes souvent privées d’opportunités.

L’une des innovations les plus marquantes du festival concerne l’art-thérapie. Dans une région où de nombreuses femmes et enfants portent les cicatrices du conflit, l’expression artistique devient un moyen de guérison. Les ateliers de peinture, de chant et de danse permettent aux participantes de retrouver confiance en elles.

Marie, ancienne résidente du camp de déplacés de Bulengo, témoigne de cette transformation grâce à la formation en pâtisserie, elle a pu créer sa petite entreprise de vente de beignets. Pour Prisca, 18 ans, l’atelier de sonorisation a ouvert des perspectives inattendues dans un domaine traditionnellement masculin.

Le festival a progressivement élargi son influence. Des artistes du Rwanda, du Burundi et du Mozambique participent désormais aux éditions annuelles, créant un véritable réseau d’échanges culturels régionaux. L’événement se déploie aussi géographiquement, touchant non seulement le centre de Goma mais aussi les camps de déplacés et les orphelinats des environs. Cette approche inclusive permet de toucher les populations les plus vulnérables.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes plus de 280 femmes ont bénéficié des formations ces deux dernières années, générant des revenus estimés à environ 500 dollars par groupe de participantes. Au-delà des aspects financiers, le festival a permis de briser des tabous et d’encourager la prise de parole féminine dans l’espace public.

L’initiative bénéficie du soutien de plusieurs partenaires, notamment l’Institut français de Goma et diverses organisations locales. Cette collaboration témoigne de la reconnaissance grandissante du projet dans le paysage culturel régional.

Fort de son succès, Musika na Kipaji envisage son extension vers d’autres villes de l’Est comme Beni, Bukavu et Bunia. Les organisateurs travaillent également sur la création d’un centre permanent d’incubation artistique féminine.

Cette expérience de Goma appui la culture qui en soit peut est un puissant levier de transformation sociale. Dans un contexte difficile, elle offre aux femmes les outils pour reconstruire leur vie et contribuer activement au développement de leur communauté.

Azga Shachikere

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